L'arrivée des fortes chaleurs doit nous inciter à
une plus grande prudence au niveau de l'hydratation des personnels
et à leur surveillance en intervention. Dans le cadre des
feux de locaux, le stress thermique est accentué par le
type d'intervention. Il faut donc rester prudent et les fortes
chaleurs doivent nous inciter à relire quelques règles
de sécurité
Le sapeur-pompier, cible de la chaleur
Lors d'une intervention sur feu de local, les contraintes thermiques
vont être importantes. La chaleur se dirigeant naturellement
de l'élément chaud vers l'élément
froid, le sapeur-pompier va être une sorte de " cible
" pour cette chaleur. Sa sécurité sera assurée
en partie par son équipement de protection individuelle (veste,
sur-pantalon...) à condition que cet équipement
soit en bon état et soit utilisé correctement.
S'il est tentant de croire qu'en accumulant les couches de tissus,
la protection sera meilleure, c'est rarement le cas : il existe
ainsi des sur-pantalons qui doivent être mis sans le pantalon
F1, d'autres qui doivent être mis avec le pantalon F1. Il
en est de même pour les vestes : les vêtements que
l'on peut mettre en dessous vont dépendre du modèle
utilisé et donc du fabricant.
Nous sommes bien ici dans un travail et une étude préparatoire
: ce n'est pas lorsque le sapeur-pompier fera un malaise en intervention
qu'il faudra commencer à réfléchir sur la
manière dont il s'est habillé, d'autant que les
conséquences d'un malaise en plein milieu d'un local en
feu, peut avoir des conséquences dramatiques, à
très court terme.
En tout cas, quelles que soient les conditions, le sapeur-pompier
sera le destinataire de la chaleur et son élévation
de température corporelle est inévitable.
Hydratation
La déshydratation est également un problème,
à ne pas sous-estimer. Très souvent, c'est après
l'effort que l'on sort les bouteilles d'eau et que tout le monde
boit. C'est mieux que rien, mais c'est trop tard. La déshydratation
se fera sentir par une fatigue accrue, par un début de
mal de tête, par la gorge sèche etc... mais tous
ces signes ont un point commun : ils sont les signaux émis
par un organisme affaibli. Or, en intervention, il faut pouvoir
compter sur des organismes pleinement fonctionnels durant l'action.
"Réparer" ces organismes une fois l'action terminée,
laisse supposer qu'une partie de cette action a été
effectuée alors que l'organisme n'était déjà
plus pleinement opérationnel.
Les multiples signaux de déshydratation sont donc de très
mauvais indicateurs puisqu'ils indiquent un état qu'il
convient de ne jamais atteindre. Il faut donc boire avant l'effort,
donc par exemple durant le trajet jusqu'au lieu de l'intervention.
Le document Britannique relatif aux entraînements
sur feux réels (disponible auprès de l'HMSO) donne
des indications sur l'hydratation et sur les règles élémentaires
à suivre avant l'engagement. Ainsi, l'absorption de café
est fortement déconseillée alors que lors des gardes,
il y a de fréquents passages à la machine à
café ! Cette boisson à tendance à influer
sur le rythme cardiaque, et devrait être évitée.
Bien évidemment, il est toujours possible de dire "moi,
ça ne me fait rien", mais dans des conditions
extrêmes, il faut mettre toutes les chances de son côté.
Piégé dans un local dont la température
est de plusieurs centaines de degrés, l'organisme n'aura
pas les réactions "habituelles" et dans ces
conditions, plus l'organisme sera "opérationnel"
et plus le sapeur-pompier augmentera ses chances de survie. |
Un geste naturel quand on a chaud, mais il ne faut pas oublier
de boire! |
En terme de sécurité, il faut bien comprendre
qu'il n'y a pas de logique binaire. C'est un peu comme pour la
ceinture de sécurité: des personnes qui l'avaient
mise sont néanmoins décédées dans
une collision, et certaines personnes sans ceinture, sont sorti
indemnes d'accidents graves. Mais ces exemples ne doivent pas
excuser le fait de ne pas mettre la ceinture, car en la mettant,
vous augmentez vos chances de survie. Ici, c'est la même
chose : en prenant café sur café, en omettant de
boire avant l'intervention etc... vous diminuez votre potentiel
"survie".
Une extinction bien dosée
Même si cela ne semble pas avoir directement de rapport,
la manière dont les intervenants vont procéder à
l'extinction, aura un impact sur leur santé.
Dans le cas d'une attaque réalisée avec un fort
débit, il sera impossible de ne pas toucher les murs. Il
y aura donc production de vapeur, et certainement saturation d'une
partie du local, en humidité. Si sur l'organisme humain,
des tests ont été réalisés, c'est
étonnement sur les animaux que l'on trouve le plus d'information.
Ainsi, le site internet http://www.heatstress.info détaille
les symptômes du stress thermique sur les animaux, dans le
contexte de l'élevage. Les symptômes sont les mêmes
que ceux décrits par Shan Rafell dans le document "La chaleur et le
stress", mais sur ce site Internet, nous trouvons
en plus des indications sur l'influence du taux d'humidité : au-delà de 50% d'humidité les effets de la chaleur
se font en effet sentir de façon encore plus importante.
En clair, un intervenant utilisant l'eau par petites impulsions,
en petit débit, pourra doser son action, tout en bénéficiant
à la fois d'un très bon refroidissement de l'atmosphère
et en maintenant le taux d'humidité du local à un
niveau très bas.
Au contraire, avec un jet utilisé à fort débit,
la portée sera telle que les murs seront atteints. Non
seulement le sapeur-pompier risquera de s'ébouillanter,
mais l'atmosphère sera moins bien refroidie, tandis que
le taux d'humidité augmentera, tout ceci étant néfaste
à l'organisme. Une étude, citée par Paul
Grimwood et réalisé par l'US Naval Research Center
a d'ailleurs confirmé tout cela.
De plus, avec de courtes impulsions en petit débit,
il n'y aura pas de ruissellement d'eau, ce qui évitera
de tremper les pantalons. Au-delà de l'aspect strictement
"confort", il ne faut pas oublier que l'eau est un
excellent conducteur de chaleur et que des vêtements mouillés
protégent moins bien, car ils permettent le transfert de
la chaleur.
En sortie
Lorsque le binôme sort du lieu d'intervention,
il convient d'ouvrir les vêtements pour "prendre l'air".
Boire abondement, évidemment, mais également se
reposer. Une fois l'opération en route, cela peut être
le rôle du conducteur ou du Chef d'Agrès, de repérer
assez rapidement une zone de repos pour les hommes. Le "petit
jeune", nouvellement incorporé peut s'avérer
très utile : il pourra aider à défaire les
ARI, amènera les bouteilles d'eau, surveillera la récupération. En ville, si le lieu de repos n'est pas facile à trouver, le fourgon peut servir à cela, le placer à l'ombre étant idéal.
Vétements secs et serviettes Typiquement le genre de chose auquel nous pensons rarement lors des départs incendies: prendre une serviette et au moins un tee-shirt de rechange. En sortie du local, trempé de sueur, il sera bien de se sécher, puis de mettre un vétement sec. Dans le cas contraire, un petit courant d'air frais suffira à vous rendre malade. |
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Ventilateur avec réserve d'eau pour brumiser. |
Au retour
Une fois l'intervention totalement terminée, la surveillance doit continuer. De retour à la caserne, le Chef d'Agrès reste responsable de ses hommes et devra les surveiller attentivement.
Aux Etats-Unis, les statistiques sur les décès en intervention sont accessibles de façon plus simple qu'en Europe. Nous pouvons donc y prélever de multiples informations qui doivent nous inciter à la prudence. Ainsi, un grand nombre de décès ont lieu par arrêt cardiaque, non pas pendant l'intervention, mais après celle-ci et
parfois même plusieurs heures après celle-ci ! La
surveillance du personnel doit donc être assez longue, surtout suite à un effort violent, dans des conditions extrêmes.
Rappel de quelques symptômes
- Crampes musculaires
- Frissons
- Mal de coeur
- Mal de ventre
- Etourdissements, vertiges
- Fatigue inhabituelle ou malaise généralisé
- Mal de tête
Dans ces différents cas, prévenir le Chef d'Agrès,
se reposer dans un endroit frais ou à l'ombre, boire de
l'eau jusqu'à récupération complète.
Si la récupération ne se fait pas complètement
ou que l'un des symptômes suivants apparait:
- Confusion
- Incohérence des propos
- Agressivité, comportement bizarre
- Perte d'équilibre
- Perte de conscience
- Vomissement
Il
y a alors urgence médicale, car il y a risque de décès
! |
Conclusion
En tout état de cause, les symptômes apparaissent
alors que le mal est fait. Il faut donc prévoir de boire
avant l'effort, prévoir un lieu de repos avant d'avoir
du personnel qui reste au soleil à ne pas savoir quoi faire
etc L'efficacité des actions dépend de l'efficacité
des hommes, et cette efficacité doit être garantie
en permanence.
Quelques liens