Ed Hartin / Firehouse.com (Trad. Franck Gaviot-Blanc, PL
Lamballais)
Les connaissances élémentaires du comportement
du feu fournissent une base pour la compréhension de son
développement dans un compartiment, sa propagation à
travers la structure, ainsi que pour les tactiques et stratégies
de lutte. Bien que pour la majorité des lecteurs, ce document
puisse être considéré comme une révision,
il y a également quelques nouveaux concepts ou manière
d'appréhender les phénomènes liées
au comportement du feu, qui seront utiles à votre compréhension.
A la fin de cet article vous trouverez une série d'études
et de questions. Ces questions ne constituent pas un "quizz"
sur le contenu de cet article, mais sont un moyen pour que vous
ayez une vision sur le comportement du feu dans la lutte contre
les incendies dans les structures. Utilisez ces questions comme
point de départ pour une discussion au moment du repas
ou lors d'une instruction informelle dans votre centre.
Les bases
Si vous regardez les textes émanant des Services Incendie,
vous y trouverez une multitude de définitions de la combustion.
Mais toutes décrivent le même phénomène
: une réaction chimique (oxydation) produisant de la chaleur
(exothermique) dans laquelle un combustible se combine avec de
l'oxygène. Dans leur forme la plus simple, l'hydrogène
et l'oxygène se combine, ce qui a pour résultat
la production de chaleur et de vapeur d'eau. La plupart du temps
ce processus est cependant bien plus complexe.
Dans un feu de structure typique, la grande variété
de combustibles et la limitation de la ventilation produit un
mélange complexe, toxique, et inflammable de solide, gaz
et vapeur, produits de combustions issus de la réaction
d'oxydation.
La façon la plus courante de représenter les éléments
clés de la combustion est l'emploi du triangle du feu.
Le triangle du feu ne fournit pas une explication complète
des processus physiques et chimiques impliqués dans le
processus de combustion. Dans le cadre qui nous concerne, il
est cependant suffisant et permet d'acquérir une bonne
connaissance du comportement du feu dans un compartiment.
La combustion exige du combustible et de l'oxygène
dans des proportions correctes ainsi qu'une énergie calorifique
suffisante pour démarrer la réaction. Le combustible
doit être en phase gazeuse (ou vapeur) afin que la combustion
puisse se produire.
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C'est simple lorsque le combustible est déjà
à l'état gazeux (comme le méthane) car le
combustible est déjà dans cet état. Les liquides
doivent être vaporisés afin que la combustion puisse
se produire. Quelques liquides se vaporisent suffisamment pour
brûler aux températures normales (l'essence par exemple),
d'autres exigent un apport de chaleur complémentaire afin
de libérer suffisamment de vapeur pour permettre la combustion
(cas du fioul). Cependant, sur un feu de compartiment, le combustible
est généralement un combustible solide comme le
bois, le papier, ou le plastique.
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Allons un peu plus loin, et voyons comme brûle
le bois. Comme montré sur le schéma ci-contre,
le bois est initialement chauffé, la vapeur d'eau est
éliminé donc le bois sèche. Comme l'action
de la chaleur se poursuit, le bois commence à pyrolyser.
Il est alors décomposé en composés volatiles
et en carbone.
Pour que l'allumage ait lieu, il faut que les vapeurs combustibles
et l'oxygène soient dans des concentrations correctes
et soient portés à leur température d'inflammation.
Noter bien que pour cela, il n'y a pas besoin que le bois solide
soit chauffé à sa température d'inflammation.
Si la concentration en vapeur combustible dégagée
est suffisante et qu'elle est mélangée à
l'air, elle peut être mise à feu.
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La vapeur combustible et le carbone brûlent séparément.
Les flammes visibles impliquent la combustion de la vapeur combustible.
D'autre part, l'oxydation du carbone peut avoir lieu à
la surface du matériau solide (comme avec le charbon de
bois rougeoyant).
La pyrolyse commence à une température très
basse (en-dessous de 200°C) par rapport à celle nécessaire
à l'allumage des produits volatiles de pyrolyse (qui s'étend
grossièrement de 500°C à 700°C). Le tableau
1 décrit les effets de la pyrolyse dans différentes
zones de température (Browne cité dans l'ouvrage
de Pitts, Johnsson, & Bryner) et les températures d'inflammation
du carbone et des composants volatiles courants, libérés
lors de la pyrolyse du bois.
Tableau 1. Zones de pyrolyse et températures d'inflammation
Zones de pyrolyse |
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Températures
d'ignition |
Zone A: jusqu'à 200°C
Le bois est séché et une partie de la décomposition
a lieu
Zone B: 200 à 280°C
Un grand nombre de composés chimiques complexes est
produit par la décomposition et les cendres apparaissent
Zone C: 280 à 500°C
Une pyrolyse rapide a lieu avec dégagement / génération
d'un grand nombre de composés chimiques complexes. Des
réactions secondaires entre ces produits peuvent avoir
lieu et du charbon de bois se form.
Zone D: > 500°C
La température de surface du charbon de bois est suffisante
pour produire des réactions secondaires (par exemple grandes
quantités de monoxyde de carbone, gaz toxique et inflammable) |
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Carbone: 407 à 590°C
Hydrogène: 580 à 590°C
Méthane: 650 à 750°C
Ethylène: 542 à 548°C
Ethane: 520 à 630°C
Benzène: 740°C
Monoxyde de carbone: 644 à 658°C
Les températures d'ignition données sont basées
sur les données de températures (basse et haute)
relevés dans des sources de références multiples.
La température d'ignition est aussi fonction de la concentration
d'oxygène dans l'atmosphère.
La pyrolyse du bois aboutit à la production d'un nombre
très important de composés chimiques complexes.
Les composés inscrits ci-dessus sont simplement un échantillon
représentatif des substances les plus communes.
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Produits de la combustion
La description des produits issus de la combustion comme la
chaleur, la fumée et parfois la lumière, est aussi
simple que celle que nous avons utilisé pour décrire
basiquement la combustion, avec le triangle du feu. De ces trois
types généraux de produits, la chaleur et la fumée
sont généralement ceux qui présentent le
plus grand intérêt pour les sapeurs-pompiers.
La chaleur est liée à l'énergie totale d'une
substance. Quant à la température, elle est liée
l'énergie cinétique moyenne (énergie du mouvement).
Un point important concernant la température est que la
chaleur se dégagera des substances ayant une température
plus élevée pour se diriger vers celles ayant une
température plus basse. C'est particulièrement important
pour la compréhension de la propagation du feu et de son
contrôle tactique.
La fumée est un aérosol constitué de
gaz, de vapeur et de substances sous forme de particules solides.
Les gaz de combustion comme le monoxyde de carbone sont généralement
incolores, alors que la vapeur et les particules fournissent
à la fumée ses différentes couleurs. La
plupart des composants de la fumée sont toxiques et présentent
une menace significative pour la vie humaine.
Souvent la fumée est perçue comme une menace
moindre par rapport aux flammes. Ce n'est pas toujours une perception
correcte. Les fuites de gaz combustible tels que le méthane
et le propane sont généralement traités
avec beaucoup de soins. Or, l'oxyde de carbone, qui est sans
doute le gaz le plus courrant, issu de la combustion, a une température
d'inflammation inférieure et une fourchette d'inflammabilité
considérablement plus grande que l'un ou l'autre des deux
autres gaz combustibles les plus courants (méthane et
propane). La figure ci-contre illustre la combustibilité
de la fumée issue du brûlage d'une "mini maison".
Ce risque souvent méconnu présente une menace significative
pour les sapeurs-pompiers si elle n'est pas atténuée
par une tactique efficace de contrôle du feu et de la ventilation.
(Ndt: un kit d'exercice "mini-maison" est
disponible dans la section téléchargement).
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Transfert thermique
Mais revenons à notre discussion initiale. Pour que
la pyrolyse puisse commencer et la mise à feu se produire,
il faut que de la chaleur soit transférée au combustible.
Le transfert thermique est également important pour comprendre
aussi bien la propagation que la tactique de contrôle du
feu.
La chaleur est transférée des matériaux
ayant une température plus élevée, à
ceux qui ont une température plus basse par trois mécanismes
de principe : Le rayonnement, la convection, et la conduction.
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Conduction : Le transfert thermique par conduction exige
un contact direct entre un objet chaud et les objets de température
inférieure. C'est la méthode de transfert thermique
qui prédomine lors des étapes initiales de développement
du feu. En outre, le contact direct entre les gaz chauds et le
combustible plus frais résulte du transfert thermique par
conduction.
Convection : Quand un milieu fluide (tel que l'air) est
chauffé il devient moins dense, il se dilate et s'élève.
Les produits chauds issus de la combustion et de la pyrolyse se
répandent par l'effet de convection et chauffent d'autres
éléments par contact (et également par le
rayonnement).
Rayonnement : Sous forme de rayonnement électromagnétique,
l'énergie calorifique s'éloigne d'un objet chaud
dans toutes les directions. La chaleur radiante est particulièrement
importante dans le développement du feu dans un compartiment
: c'est un des premiers mécanismes de propagation du feu
dans le compartiment. Bien que nous pensions habituellement au
rayonnement causé par les flammes, en fait n'importe quel
objet chaud émet de l'énergie calorifique par rayonnement.
Les gaz chauds et en particulier les particules (tel que le carbone)
présentes dans la fumée, peuvent émettre
une chaleur importante par rayonnement.
La connaissance du transfert thermique est essentielle pour la
compréhension du développement d'un feu. Il est
aussi important pour utiliser efficacement l'eau comme agent d'extinction
!
Autres concepts importants
Notre intérêt dans le développement d'un
feu de compartiments concerne principalement la combustion avec
flamme, de l'étape initiale au plein développement
du feu.
Quand la vapeur combustible doit se mélanger à l'air
dans la zone de combustion, la flamme résultante est appelée
flamme de diffusion (la vapeur combustible doit se diffuser pour
atteindre sa limite d'inflammabilité dans l'air). Dans
une flamme de diffusion, le combustible se répand (se diffuse)
dans l'air pour former une zone de réaction contenant le
combustible, l'air et la chaleur en proportion correcte pour une
combustion soutenue. Lorsque la vapeur combustible est mélangée
avant la combustion, nous parlons de flamme de pré-mélange.
Le concept de " pauvre " ou " riche "
(utilisé pour décrire le mélange de gaz
combustible ou de vapeur avec l'air) ne s'appliquent qu'aux flammes
de pré mélange.
Flammes de diffusion et de pré mélange sont
illustrées sur la figure ci-contre.
- Quand l'entrée d'air sur le brûleur du Bec Bunsen
est fermée, le mélange de combustible et d'air
en fait en dehors du brûleur produisant une flamme clignotante
jaune. C'est une flamme de diffusion.
- Quand l'entrée d'air est ouverte, de l'air est mélangé
au combustible dans des proportions correctes avant la combustion,
la flamme change d'aspect (ici, elle devient bleue) et la température
de la flamme augmente. C'est une flamme de pré-mélange.
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Dans la plupart des cas, le feu qui se développe dans un
compartiment est composé de flammes de diffusion. Les produits
de pyrolyse qui sont dégagés du solide combustible
chaud sont mélanger avec l'air au moment de la combustion.
Parfois ceci a lieu à une distance considérable
du combustible solide (penser aux flammes sortant d'une porte
ou d'une fenêtre). Quand le combustible et l'air se mélangent
avant la combustion, l'allumage du mélange combustible
/ air peut libérer une énorme quantité d'énergie
(ceci, ajouté à un certains nombre de concepts étudiés
précédemment, aura une grande importante dans la
suite).
Alors que le triangle du feu représente le combustible,
la chaleur, et l'oxygène,d'autres matériaux peuvent
avoir un impact significatif sur la façon dont un feu se
développe. Les matériaux non combustibles tels que
les gaz non combustibles composant l'autre partie de l'air (à
79%), la vapeur d'eau ainsi que l'humidité du combustible
absorbent l'énergie calorifique et ralentissent le processus
de mise à feu et de combustion. Il suffit de prendre deux
feuilles de papier journal, de pulvériser un brouillard
d'eau sur l'une d'elles et d'essayer ensuite d'allumer les deux
feuilles, pour s'en rendre compte. La feuille humide sera difficile
sinon impossible à brûler car l'allumette devra d'abord
réaliser l'évaporation de l'eau avant de pouvoir
enflammer le combustible. Les matériaux qui absorbent la
chaleur, mais qui ne participent pas activement à la réaction
de combustion sont désignés sous le nom de "ballast
thermique". Si ce concept est important lors de la compréhension
du développement du feu, il l'est également dans
l'efficacité de la tactique de contrôle du feu mise
en oeuvre pour empêcher ou réduire la probabilité
d'une progression rapide du feu.
Etude et discussion Questions
Il y a une grande différence entre l'étude du
comportement du feu et l'approche basée en premier sur
l'expérience. Résistez à la tentation d'éliminer
les concepts de base en disant qu'ils sont trop simples ou élémentaires.
Résistez également à la tentation de dire
que les explications plus détaillées sont trop complexes.
Faire le lien entre la théorie et votre propre expérience
ou l'expérience des autres est une solution efficace pour
apprendre. Utilisez ces questions pour concentrer votre réflexion
sur la façon dont la théorie de base du comportement
du feu se relie aux incidents sur lesquels vous ou d'autres membres
de votre équipe êtes intervenus.
- Comment les opérations de suppression du feu et la
ventilation tactique influencent-elles les trois côtés
du triangle du feu ? La réponse qui viendra le plus rapidement
à l'esprit sera "la chaleur" (le coté
chaleur du triangle). Pourtant, nous avons actuellement la possibilité
d'agir sur les 3 côtés et ce de plus d'une façon.
- Comment la fumée chaude s'étendant au travers
de la structure contribue-t-elle à la pyrolyse des combustibles
placés loin du feu?
- Comment cela pourrait-il influencer la propagation du feu
et quel est le risque que cela présente pour les intervenants
?
- Qu'est ce qui représente la plus grande menace pour
les sapeurs-pompiers : les flammes ou à la fumée
? Essayer de bien réfléchir aux raisons qui vous
poussent à répondre de la sorte.
- Comment la chaleur est-elle transférée des
matériaux chauds vers l'eau utilisée pour le contrôle
du feu et son extinction ? Quels facteurs pourraient influencer
l'efficacité de ce processus ?
- Comme mentionné dans cet article, la majeure partie
de la combustion avec flammes dans un feu de structure implique
des flammes de diffusion, où pourriez-vous rencontrer
les flammes pré mélangées ?
- Comment le concept de "ballast thermique" se relie-t-il
au contrôle et à la suppression du feu ?
References
Pitts, W.M., Johnsson, E.L., & Bryner, N.P. (1994). Carbon
monoxide formation in fires by high-temperature anaerobic wood
pyrolysis. Twenty-Fifth Symposium (International) on Combustion.
Pittsburg, PA. The Combustion Institute. 1455-1462.